Les sociétés holding sont généralement évaluées sur la base de leur Actif Net Réévalué (ANR). La détermination de cet ANR donne lieu à la mise en œuvre de méthodes d’évaluation adaptées aux actifs sous-jacents détenus par le holding (DCF, multiple, cours de bourse, Expertise des actifs immobiliers…).

Cette approche permet d’obtenir la valeur dite fondamentale du holding. L’estimation de la valeur vénale, quant à elle, implique d’estimer le prix qui pourrait être obtenu par le jeu de l’offre et de la demande. L’observation des transactions sur des titres de sociétés holding donne généralement lieu à la constatation d’une décote, dite « décote de holding » ; cette dernière doit être considérée lorsqu’il s’agit d’évaluer la valeur vénale.

Quelles sont les sociétés visées ?

Les sociétés holding ont pour objet de détenir des actifs diversifiés, généralement des titres de participation. Il existe plusieurs natures de holding, dont les principales sont brièvement décrites ci-dessous :

– Holding de contrôle destiné à conserver la majorité du capital en multipliant les minoritaires à différents niveaux (ex : Holding du groupe Casino).

– Holding familial souhaitant diversifier ses actifs (ex : Famille Peugeot via le holding FFP).

– Groupe qui conduit une stratégie de diversification (ex : Bouygues qui est présent dans plusieurs domaines d’activité, tels que les télécoms, la construction et la télévision).

– Sociétés d’investissement, tels que les fonds d’investissements (Eurazeo, Siparex…).

L’origine de la décote de holding

Plusieurs paramètres cumulatifs peuvent expliquer cette décote, parmi les principaux :

– L’illiquidité des actions qui détiennent des actifs sans forcément de lien ou de cohérence. Cette illiquidité s’accentue dans le cas de « cascades » de holding. Le holding est ainsi moins liquide que les actifs sous-jacents qui seraient cotés.

– La fiscalité latente liée aux plus-values latentes des actifs sous-jacents.

– L’absence de réelles synergies entre les actifs détenus par le holding. Ceci est notamment le cas des conglomérats comme Vivendi ou Bouygues qui ont poursuivi une stratégie de diversification. Dans ces derniers cas, on parle parfois de « décote de conglomérat ».

– Le coût de fonctionnement humains et techniques afin d’assurer la gestion des participations qui viennent amoindrir les revenus en provenance des filiales.

– La position de minoritaire en cas d’absence de contrôle par le holding, mais ceci n’est pas systématique.

– Le niveau de distribution des dividendes.

Comment estimer la décote de holding ?

Il est difficile d’apprécier avec exactitude le niveau de décote de holding à appliquer. Néanmoins, l’observation des décotes des sociétés holding cotées constitue une bonne référence de départ car elle permet de matérialiser le niveau actuel des décotes sur un marché actif. Il est préférable de comparer des holdings présentant des caractéristiques similaires dans la mesure du possible. Il est à noter que l’administration fiscale, dans son guide sur l’évaluation d’entreprise publié en 2006, indique que le niveau des décotes de holding se situe en moyenne à 30% sur la base de l’observation du marché boursier (jusqu’à 50% dans des cas exceptionnel).

L’observation de la décote de holding issue des holding cotés n’est pas exempte de tout reproche. En effet, le niveau de la décote dépendra du calcul de l’ANR qui sera plus ou moins sensible à l’évolution du marché selon que les actifs sous-jacents du holding soient principalement constitués ou non de sociétés cotées. De plus, certaines sociétés holding publient leur ANR « officiel » d’autres ne le font pas. En outre, la méthodologie de calcul peut présenter des divergences. Nous observons que dans un contexte d’incertitude économique et fiscale (quid du sort des plus-values d’imposition, des reports déficitaires…), l’écart entre l’ANR et le cours de bourse à tendance à s’accentuer.

Après avoir observé le niveau des décotes de holding sur le marché, il convient de considérer les caractéristiques intrinsèques du holding à évaluer. L’objet étant d’apprécier leur impact sur l’ampleur de la décote de holding à considérer par rapport aux observations faites sur le marché boursier :

– Le niveau des plus-values latentes et le niveau d’imposition qui en résulte. L’existence de reports déficitaires imputables sur les plus-values latentes est à considérer.

– Le niveau des coûts de fonctionnement du holding qui peut être modélisé par l’actualisation des coûts annuels à l’infini au coût du capital.

– Le degré d’illiquidité de l’action, notamment au travers de l’analyse du caractère liquide ou non des actifs sous-jacents (titres cotés, sociétés encours de cession…). Ainsi, le holding détenant principalement des sociétés cotées liquides devrait conduire à réduire l’ampleur de la décote.

– La détention de participation minoritaire ou majoritaire.

– Le niveau de distribution de dividendes.

– Autres spécificités pouvant être considérées : Transparence des informations concernant les différentes activités portées par le holding ; Qualité de l’équipe d’une société d’investissement dès lors où celle-ci est en mesure d’influer sur la stratégie des actifs sous-jacents et donc sur leur valorisation ; Existence de synergies éventuelles entre certaines participations détenues. Par contre, les sociétés holding disposant de réserves de trésorerie ne se valorisent pas forcément mieux que celles qui sont endettées.

Tous ces paramètres sont à considérer lors de l’estimation de la décote de holding. Le risque de majoration ou de minoration pourrait intervenir dès lors où l’analyse serait limitée à un nombre de critère restreint (ex : ne pas considérer de décote de holding du seul fait de la cession en cours de certains actifs). Ainsi, certaines sociétés holding ont pu s’introduire sur le marché sur la base de leur seul ANR sans considération d’une décote de holding, mais le marché a rapidement retrouvé ses « marques ».

Philippe Campos

Article paru dans le Magazine des Affaires.